Les Régions viticoles d'Algérie
La vigne, les premières années, s'était installée dans les plaines côtières, fertiles, mise en valeur autour des centres de peuplement, puis progressivement elle avait accompagné l'avancée de la colonisation, s'étendant de plus en plus loin et grimpant de plus en plus haut.
Au moment de l'indépendance de l'Algérie, la vigne couvrait encore 350.000 ha, avec une production variant de 14 à 18 millions d'hectolitres. Elle représentait, sur le plan économique, 10% des terres cultivées mais plus de 30% en valeur, et faisait vivre directement 32.140 familles d'exploitants.
Le vignoble algérien, implanté dans des sols très divers et des climats à températures élevées sans grande amplitude, et soumis à une pluviométrie modérée mais violente, faible à l'Ouest mais plus importante vers la Kabylie, se caractérisait essentiellement par de basses plaines littorales, de hautes terres souvent caillouteuses, et des coteaux géographiquement très limités.
Les vignobles de plaine établis sur des sols d'alluvions profondes, sablonneuses et siliceuses, subissaient l'influence marine chargée d'humidité.
La Mitidja algéroise (53 000 ha), les plaines de Bône, de Phillipeville, des Issers, conduisaient leurs vignes en palissage élevé, taille Royat et gros rendement. Les degrés étaient faibles, la couleur faisait défaut, et la qualité souvent remise en cause par la pluviométrie importante, 750 à 1000 mm, les maladies et le nombre de traitements qu'elles entraînaient.
Classés en plaines également, on trouvait des vignobles de l'Oranie, de Mostaganem à Beni-Saf. Le climat était plus sec, les terres moins fécondes dès que l'on quittait les sables d'alluvions, et les abords salés des sebkhas. Les vignes étaient conduites en gobelets, peu productives, et donnaient des vins colorés, souples, alcoolisés, souvent destinés au coupage. Des plateaux pierreux, calcaires, difficiles à travailler, émergeaient des sables par endroits, et se caractérisaient par des vins rouges, de garde, plus toriques et plus charpentés. Notre village Saint-Cloud en faisait partie.Rio Salado était réputé pour la production de vins "rosés d'Alicante", très prisés par le commerce pour "rafraîchir" certains vins vieux.
Les vignobles des hautes terres, conduits toujours en gobelets, s'éloignaient de la côte vers les régions plus chaudes de l'intérieur et non soumise à l'influence de la mer. On les trouvait dans les collines du Dahra près de Mostaganem, dans la région de Sid Bel Abbés et d'Aïn Temouchent qui représentait à elle seule le quart du vignoble d'Oranie. Les terrains étaient secs, souvent calcaires, parfois volcaniques, la production faible et les vins capiteux.
Les vignobles des coteaux s'étageaient de 700 à 1000 mètres dans l'arrière pays et les contreforts de l'Atlas Tellien. Le climat était sec et chaud et les hivers froids, les terrains de sables grossiers et de calcaires. D'ouest en Est se succédaient Tlemcen - Mascara -Miliana - Médéa et Ain Bessem en Kabylie.
Les vins étaient pour la plupart classés V.D.Q.S. avec un degré supérieur à 12° et étaient consommés sur place ou exportés en l'état. Certains d'entre eux ont connu une grande notoriété "Targui" "Royal Kébir" "Hoggar" "Tsmara" "Lismara", diffusés par les producteurs ou des négociants des places d'Algérie : Long (Alger), Seneclauze, Gay, Francivin (Oran).
De grands embouteilleurs du continent s'approvisionnaient également essentiellement en rosés du Sahel comme Damoy et Nicolas. Et les pères blancs du domaine de l'Harrach, comme ceux du domaine de la Trappe, connaissaient un succès commercial particulièrement justifié.
Le vignoble oranais était en superficie, comme en production, le plus important. Plus de 26.000 récoltants déclaraient, dans les dernières années, 11.500.000 hl pour une superficie de 246.000ha. La production moyenne pour 9,38 ha par exploitant était de l'ordre de 47 hl.
Il était suivi par le vignoble algérois avec 87.150 ha et une production de 6.274.000 hl.
Les récoltants n'étaient plus que 5.060 pour une superficie individuelle moyenne de 17,22 ha et un rendement de 72 hl/ha.
Constantine avait beaucoup régressé et le vignoble s'y était davantage concentré. Ils étaient 612 exploitants, avec une superficie moyenne de 26,74 ha, un rendement de 48 hl/ha pour un vignoble de 16.360 ha qui produisait 781.770 hl.
En 1960, avant l'insécurité qui allait désertifier progressivement les campagnes, l'Algérie avait produit 18.600.634 hl pour 349.670 hectares, avec 31.900 déclarants dont 26.235 pour l'ancien département d'Oran.