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L'Abbé Gabriel LAMBERT (1900-1979)

Écrit par Paul Birebent. Associe a la categorie Autres personnages remarquables

L'abbé Lambert maire d'Oran

 


Le projet de construction d'un barrage à Béni-Bahdel, au sud-ouest de Tlemcen, avait été étudié et programmé par le service de l'Hydraulique en 1920. Les travaux n'avaient pas encore commencé en 1932, L'eau de Brédeah était gérée depuis 1913 par une Société Fermière. Au fil du temps, avec les besoins croissants, elle était devenue de plus en plus salée et à peine buvable. Le maire, M. Ménudier, sous prétexte que l'exploitant n'avait pas cherché à améliorer la qualité de l'eau comme cela était stipulé dans son contrat, lui avait intenté un procès en déchéance. Le Conseil de préfecture l'avait prononcée. La Société Fermière s'était pourvue en Conseil d'Etat.

Des charrettes attelées sillonnaient les rues de la ville, de la Calère aux « Beaux Quartiers ». Les cochers proposaient de l'eau douce de Ras el Aïn, qu'ils transportaient dans des bonbonnes de verre, habillées et capuchonnées d'alfa tressé. « Agua, agua dulce ». Les ménagères en achetaient pour cuire les pois cassés et les pois chiches, les hommes pour boire le café « Niziére » du matin, et l'anisette « Cristal » de midi et du soir. Cela ne pouvait plus durer. Il fallait faire quelque chose avant les prochaines élections.lambert1-portrait
C'est alors qu'était intervenu l'abbé Lambert à l'automne 1932. Gabriel, Irénée, Séraphin Lambert était originaire de Villefranche-sur-Mer où il avait vu le jour le 3 avril 1900 (1). Plus tard il avait fait ses études au séminaire de Saint-Flour dans le Cantal, Élève dissipé, mais intelligent et brillant, il avait achevé sa formation théologique à l'institut catholique de Toulouse. Nommé vicaire, puis ordonné prêtre, il avait pendant deux ans exercé son sacerdoce dans une petite paroisse de la région. Avant d'être appelé pour ses obligations militaires, à Saint-Maixent-l'École d'abord, puis dans un régiment de l'armée du Rhin. II avait terminé sous-lieutenant. Au retour dans la vie civile, la vocation de Gabriel Lambert avait commence à vaciller. Sa foi restait grande mais devenait plus temporelle. Dans l'armée il s'était converti à l'antimilitarisme. Il fréquentait les milieux pacifistes, et participait à des congrès internationaux pour la paix dans le monde et la fraternité des peuples.

Dans le Midi, il s'était découvert des dons pour la radiesthésie qu'il continuait à exploiter et dont il tirait profit. Il avait rallié la corporation secrète, enviée et souvent maudite des sourciers. Sa vie qui n'avait jamais été monastique, devenait plus dissipée, presque mondaine. Il donnait des conférences, écrivait, publiait un livre(2), faisait jouer une pièce de théâtre (3) et engageait une secrétaire.

La discrétion, l'humilité, la vie intérieure, n'étaient pas les vertus premières de l'abbé Lambert. Sa conduite s'entachait de quelques écarts. Très vite il était rappelé à l'ordre et interdit de sacerdoce. Par le même temps, sa réputation de sourcier s'était imposée. I! était considéré parmi les meilleurs de France. On le demandait dans toutes les régions déshéritées, notamment dans le pays niçois de son enfance où il s'était installé. En 1930, il était venu en Oranie et avait trouvé de l'eau à Montgolfier. Bientôt sa notoriété avait franchi les portes du gouvernement général qui l'avait fait mander, début 1932, après l'échec d'une mission géologique formée dans les universités et son incapacité à régler la pénurie chronique d'eau dans divers secteurs de la colonie. L'abbé Lambert avait troqué son chapeau rond contre un casque colonial kaki et, pendule à la main, avait arpenté le bled. Une première mission l'avait conduit sur les Hauts Plateaux du Sud, à Khenchela près de la frontière tunisienne et à Chellala-Reibell dans le Sersou. Les maires et les colons de la plaine de Bône le réclamaient, le recevaient, et le sourcier Lambert trouvait de l'eau. Il évaluait la profondeur, estimait le débit et la qualité de la nappe.

Les journaux avaient rapporté ses succès, là où les scientifiques avaient échoué. Ils ne tarissaient pas d'éloges sur ses capacités et ses dons de sourcier. L'abbé les aidait en accordant avec complaisance des entretiens. C'est dans ce contexte que la municipalité d'Oran avait souhaité le concours de l'abbé Lambert. Il était arrivé à Oran dans la matinée du 10 novembre et avait surpris ses interlocuteurs. Il était imberbe et jeune, 30 ans à peine, avait le front haut, légèrement dégarni. Il chaussait de fines lunettes sur ses yeux pétillants de malice, portait toujours soutane, col blanc rigide, et grosses chaussures noires de paysan.

Il était accompagné d'une brune secrétaire d'origine corse, Martha Rossignol!, femme d'instituteur, rencontrée près de Constantine, et s'était installé dans un hôtel confortable. Le maire d'Oran, M. Mènudier lui avait confié une mission de prospection. En cas de succès il promettait de lui remettre deux millions de francs(4).

La zone de recherches devait se limiter au voisinage oranais, à l'exclusion de Brédeah. En effet, une précédente mission scientifique avait déposé un rapport négatif. Leslambert2-dessin seules ressources en eau. exploitables, se situaient à Brédeah et seraient toujours polluées par les infiltrations salées de la grande Sebka. L'abbé Lambert avait repris son pendule et recoiffé son casque. Des jours durant il avait arpenté le périmètre oranais. Des «bains de la Reine » sur la Corniche, à Tafaraoui dans la plaine du Tlélat, en passant par la source Noiseux, Pont Albin, Aïn Beïda et Saint Maur. Sans succès. Irrésistiblement, le pendule le ramenait vers Brédeah. Entre deux tournées dans le bled, l'abbé recevait dans son hôtel où sa secrétaire tenait une permanence. Des colons, des notabilités de « l'intérieur » sollicitaient ses services. Les fermes, les villages manquaient d'eau. L'abbé accueillait avec le sourire, déployait une carte, parlait géographie, prenait des notes, promettait de rappeler dès qu'un acompte d'honoraires serait versé sur son compte en banque. Pour autant Brédeah n'était pas négligé. En dépit de l'opposition du maire, l'abbé Lambert, à ses frais, avait fait creuser d'autres puits, en amont des premiers, plus au nord entre Misserghin et Bou Tlélis. Il avait trouvé de l'eau et le proclamait haut et fort. « l'ai trouvé pour Oran 20000 m3 d'eau douce, limpide et cristalline » (5) L'eau existait en profondeur sous la carapace des calcaires du Murdjadjo.
Des cours d'eau souterrains et parfaitement cloisonnés coulaient vers la Sebka, à proximité de laquelle il y avait risque « d'anastomose » "'. Pour l'éviter, il suffisait de tuber les forages, de pomper sans excès et de multiplier les puits. La nouvelle de la découverte de l'abbé Lambert avait vite fait le tour de la ville. Le «  seňor cura » avait trouvé de l'eau douce. On en parlait dans les cafés, dans la rue, aux étals des marchés, place de la Perle et place de la Bastille, mais aussi dans le bureau de M. le maire. Le conseil municipal en avait délibéré et avait rejeté les affirmations de l'abbé Lambert. L'eau de Brédeah était salée et resterait salée. L'eau trouvée le deviendrait à son tour dès lors qu'on en abuserait. Telle était la conclusion du précédent rapport d'experts. La prime promise de deux millions de francs était refusée. Elle ne se justifiait pas. Elle était pourtant insignifiante pour le budget municipal et allait coûter bien plus cher à la municipalité et à son maire Ménudier. Personnage truculent et fin psychologue, Gabriel Lambert avait saisi le parti qu'il pouvait tirer du refus de la municipalité d'honorer ses engagements. Il louait des autobus et invitait les Oranais à venir goûter « son eau »de Brédeah. Le maire prétendait que l'eau était salée, la population pouvait juger. Il ne voulait pas payer les deux millions parce que ce n'était pas assez cher, trop transparent, et sans commissions occultes. Des invectives contre le conseil municipal étaient lancées dans les bas quartiers. On entendait les cris de « démission », «falsos », « ladrones »
Des conseillers avaient compris la fureur populaire, pressenti le changement d'opinion. Un, puis deux, bientôt sept, enfin neuf avaient démissionné.
 

L'abbé Lambert pouvait partir en campagne. Il l'avait fait avec une fougue inhabituelle chez un homme d'Église, une disponibilité permanente, un populisme qui ralliait, des mots d'esprit faciles qui mettaient les rieurs de son côté. Il offrait des tournées d'anisette allongée de « son eau », en distribuait en petites bouteilles dans les quartiers populaires. « On prétend que mon eau est salée, je veux en faire juge mes électeurs » (7). Il faisait sur les murs de la ville placarder des affiches. Il donnait des conférences. Orateur de talent à la voix puissante et convaincante, l'abbé s'exprimait avec aisance et des mots simples, Ses propos portaient, déchaînaient l'enthousiasme. Ses auditeurs hurlaient « Vive Lambert », « Vive abbi Lanibir », « il va les manger tous » »". Ils conspuaient l'ancien ne municipalité qui refusait de leur donner l'eau douce de Brédeah, parce qu' «  elle n'était pas bénite »(8)  avait dît l'abbé en faisant allusion à ses démêlés avec 1’épiscopat.

A chacune de ses interventions publiques il martelait ses idées de rassemblement et de paix intercommunautaires. Il dénonçait le comportement des maires précédents qui avaient fait d'Oran une ville de « haine raciale » (9)et prêchait la réconciliation des races et des religions. Il prônait l'union dans la France des Arabes, des Juifs, et des « néos » (9), ces Espagnols naturalisés et mal assimilés, de condition modeste, souvent méprisés et qui représentaient près de la moitié de la population d'Oran.

Le petit peuple des « bas quartiers », de la « rue des Juifs », de la place d'Armes, de Kargentah et des faubourgs, acclamait ce « Français naturel » (10} qui ne les repoussait pas et faisait appel à eux pour la première fois. Les Juifs, exclus de la vie politique locale depuis de longues années, avaient été parmi les premiers à rallier l'abbé Lambert. Ils finançaient sa campagne et avec les « nêos » remplissaient les salles de réunion. Ils avaient enfin un chef qui les tirait de l'ombre et de leur condition de sous-citoyens.


Oran, la rue d'Austerlitz (la rue des juifs) en 1908
(extrait de De l'autre côté de la mer, Oran et l'Oranie, de Marie Gil)

Pour d'autres raisons, sociales ou politiques, d'autres catégories d'Oranais, des socialistes et des francs-maçons, ralliaient l'homme de paix, et non pas l'abbé portant soutane. Ils cherchaient avant tout à déstabiliser Ménudier.

Le 24 décembre 1933, après un ballottage au premier tour, l'abbé Lambert et huit de ses colistiers étaient élus conseillers des municipales complémentaires (l1). La liste Lambert devançait largement la liste socialiste de Marius Dubois et la liste communiste de Maurice Benaïch et Pierre Larribère(12). Neuf conseillers municipaux dans l'opposition contre trente-neuf ne suffisaient pas à l'abbé Lambert. Il poursuivait la bataille. Dès lors, le bon fonctionnement du conseil municipal allait être perturbé. Les réunions étaient houleuses ou se faisaient à huis clos. Pour éviter les incidents, le maire les espaçait, jouait la discrétion, évitait la publicité. L'abbé Lambert, par avance, savourait sa prochaine victoire. Il relançait sa campagne d'accusations par des proclamations, des pamphlets dans la presse, des discours en salles.

Il avait créé des comités de quartiers, avec bureau et personnel d'animation, chargés de soutenir et de promouvoir sa candidature. On les avait vite appelés les « Amitiés Lambert ». Lors d'une séance du conseil municipal, afin de prévenir tout incident et surtout afin d'éviter que l'abbé ne harangue ses fidèles convoqués place d'Armes, le maire avait fait condamner les fenêtres de la salle de délibérations. Le bruit d'un complot avait filtré au dehors. Croyant l'abbé menacé, la foule s'était précipitée vers la mairie, avait forcé les portes, bousculé le service d'ordre. Dans l'empoignade qui avait suivi au premier étage, l'abbé Lambert avait été jeté à terre. On l'avait relevé, le visage ensanglanté et fait transporter à l'hôpital. Ce n'était pas grave, mais la rumeur s'était enflée. Il y avait eu attentat. Les cris de « démission », avaient fusé, plus hargneux. M. Ménudier avait cédé et présenté sa démission au préfet qui l'avait acceptée.

Dès lors, de nouvelles élections municipales étaient programmées et l'abbé Lambert repartait en campagne. Il portait toujours la soutane et le col blanc rigide. Sa haute et mince silhouette, ses lunettes à monture encore plus fine et chaînette, son large sourire ne passaient pas inaperçus. L'abbé était applaudi, accueilli par des ovations, parfois porté en triomphe, comme un « torero » dans les arènes. Dans les réunions, ses « aficionados » vendaient des bustes miniatures en terre cuite qui le représentaient; des petites bouteilles d'eau de Brédeah dont le bouchon, à son image, était coiffé du casque colonial, de la chéchia ou de la kîffa. Ils distribuaient gratuitement des photographies de l'abbé qui éloignaient le « mal de ojo » et portaient bonheur. Ceux qui les détenaient étaient assurés d'obtenir de bonnes notes à l'école d'avoir de la chance à la loterie (12),de trouver plus facilement un emploi, de ramener plus de poissons lors de parties de pêche. Elles soulageaient les malades et dynamisaient les vieux. Les pharmaciens faisaient grise mine. La « Jouvence de l'abbé Soury » ne se vendait plus  (13). De nombreux nouveau-nés dans les bas quartiers portaient le prénom de Gabriel.

C'en était trop pour Mgr Durand, l'intransigeant, rigide et nouvel évêque d'Oran, par ailleurs inconditionnel de l'ancien maire démissionnaire. Autoritaire et froid, l'évêque était contesté, dans les cercles privés, par des prêtres de son diocèse, et par les plus prati- quants de ses paroissiens. Dès le mois de février 1933, il avait demandé à l'abbé Lambert, qui avait refusé, de quitter la ville. Un long échange de lettres avait suivi sans résultat, et en mai, Mgr Durand avait décrété à l’encontre de l'abbé, une « interdiction de diocèse ». L'abbé Lambert, déjà interdit en France, ne pouvait pas célébrer la messe, donner les sacrements, ni pénétrer en soutane dans la cathédrale. Il avait riposté en publiant sa correspondance avec l'évêché. Les Oranais avaient pris le parti d'en rire et les démêlés de l'abbé avec l'épiscopat étaient l'un de leurs sujets favoris de conversation, « Ole, Toro! ».


Gabriel Lambert, 33e maire d'Oran


Inlassablement les « Amitiés Lambert » poursuivaient leur idée de grand rassemblement de toutes les tendances opposées à la municipalité sortante. Mais les Juifs, cette fois, prenaient leurs distances. Ils ne figuraient pas sur la liste des candidats, alors que des « néos » y étaient en bonne place. La liste Lambert se positionnait comme une troisième force entre les « latins » antisémites, chers à feu le docteur Molle, et les socialistes. Elle était élue le 12 mai 1934, au second tour, dans son intégralité de 47 conseillers municipaux, devant la liste socialiste de Dubois, celle de l'Union Latine, antijuive de Navarro, une troisième du bloc ouvrier et paysan, communiste, et une dernière radicale (14).

Gabriel Lambert devenait à 34 ans, le 33eme maire d'Oran. Le samedi 18, en séance plénière et devant un public enthousiaste, sa mère, venue de France, avait la joie de ceindre l'écharpe tricolore autour de la taille de son fils. Le premier adjoint était un « néo ». Son élection avait déchaîné des manifestations bruyantes et partisanes. Le maire s'était interposé : « }e ne permettrai pas qu 'ou fasse une distinction entre les citoyens d'Oran, quelle que soit leur origine. Vous êtes tons Français » (15).
Sans tarder, l'abbé Lambert, dont la devise était: « pour tous, contre personne », s'était mis au travail avec ses adjoints pour une ville d'Oran, qu'ils voulaient ensemble
« toujours plus belle, plus grande, plus forte, plus prospère, tous unis dans le travail et la paix » (16).

Le problème de l'eau restait crucial. L'abbé Lambert avait été élu sur la promesse d'apporter à Oran « 30 000m3 d'eau pure', claire et cristalline ». Dès le mois de juillet après liquidation du contentieux municipal avec la Société Fermière Germain et Cie, un nouveau contrat d'affermage était signé avec la Société Algérienne des Eaux. Un crédit de 500000 F êtait voté pour entreprendre de nouveaux puits et poser des canalisations. Le maire, par ailleurs, envisageait la possibilité d'amener l'eau du barrage de Béni-Bahdel par une conduite forcée.

Il se consacrait à la gestion de la ville et entreprenait une politique audacieuse de grands travaux (17). Il démolissait les anciens murs pour ouvrir le somptueux « boulevard des 40 mètres ». Il perçait la vieille muraille de l'enceinte espagnole à hauteur des lavoirs de Ras el Aïn et de la porte du Santon pour donner accès à la nouvelle route panoramique des Planteurs. Il mettait en chantier les Halles Centrales, les Magasins Généraux, la Recette Principale de la rue El Moungar, le parc municipal, les marchés Michelet et Lamoricière, et n'oubliait pas les indigents en créant la « Soupe Populaire », et en offrant la gratuite des livres scolaires aux élèves des écoles indigènes. Il traitait avec la Compagnie des Dragages la pose de réseaux d'égouts dans la vieille ville, le faubourg Lamur et les nouveaux quartiers de la Cressonnière, de la Mina et du Ravin Blanc. Il demandait à ses services techniques d'envisager la construction d'un boulevard en front de mer et en surplomb du port, le long de la falaise de Miramar. À la porte de son bureau de la mairie, avant même son ouverture, se pressaient chaque jour d'innombrables solliciteurs.
Tout au long de sa campagne électorale, le fougueux abbé, un peu à la légère, avait fait beaucoup de promesses. Des femmes quémandaient un emploi municipal pour leur fils, une affectation spéciale pour leur mari. Des oubliés voulaient une promotion, des laissés-pour-compte un petit bureau, des mal-loges une maison. Ils rappelaient les promesses faites. L'abbé Lambert ne pouvait satisfaire tout le monde, ni tout de suite. À la longue, il devenait évasif, remettait à plus tard, promettait de reprendre contact. Il commençait à faire des mécontents et perdait de sa popularité.
Pourtant sa capacité de rencontrer en profondeur la population restait immense. La majorité des Oranais, dans les « basses couches », continuait de lui manifester sa dévotion. Les classes aisées du centre-ville le traitaient avec suspicion mais s'en rapprochaient. Il était un défroqué, ce qui amusait; il était aussi un aventurier dont elles se méfiaient. Pour les politiques, il se comportait comme un trouble-fête, insaisissable, difficile à classer. Déjà, peu après son élection, l'abbé Lambert avait dû faire face à des grèves des ouvriers du bâtiment qui paralysaient une quarantaine de chantiers municipaux. Le maire avait violemment réagi pour assurer la « liberté du travail » des non grévistes. Il menaçait les « meneurs indigènes et étrangers » des foudres des tribunaux et accusait des « gens de l'extrême droite, royalistes et antijuifs notoires de se ranger du côté des communistes »;  « les extrêmes se touchent » (18).

En dépit de ses débordantes activités municipales, l'abbé Lambert n'avait jamais cessé tout à fait ses recherches de sourcier. On le réclamait toujours dans le « bled ». Il trouvait le temps d'y aller et était reçu princièrement dans les fermes et les villages, en ami de la famille. Il se montrait chaleureux, très à l'aise, aimait plaisanter, jouer avec les enfants. Sa côte montait chez les colons. On l'avait ainsi reçu à Rio Salado, à Saint Denis-du-Sig, dans la forêt de Moulay Ismaël, à Saint-Cloud, à Port-aux-Poules. L'opposition municipale d'Oran l'attaquait sur le problème de l'eau. Elle lui reprochait de ne pas aller assez vite. Le maire avait pourtant opté pour la solution la plus rapide. Celle de mélanger l'eau de Brédeah avec celle des nouveaux puits, afin de diminuer son taux de salinité.

Le 14 juillet, M. Maire avait participé à sa première grande cérémonie officielle. Dans la tribune dressée pour le défilé des troupes, boulevard Paul Doumer, il dominait de toute sa légitimité aux côtés des représentants du préfet (19) et du général, tous deux en congés. II avait présidé l'après-midi une distribution de vêtements au Village Nègre, et assisté dans la soirée au feu d'artifice tiré depuis le Ravin Blanc.
Pour autant l'abbé Lambert n'oubliait pas ses nouvelles ambitions politiques. Le 14 octobre 1934, il se portait candidat dans la deuxième circonscription d'Oran-Casbah, pour une élection cantonale, et était battu par le socialiste sortant, Marins Dubois (20) La crise viticole de surproduction et de chute des cours qui secouait le monde paysan, l'attitude de réserve du nouveau parti des forces politiques de droite, le « Manifeste des Républicains Nationaux » avaient joué contre lui.
L'abbé Lambert avait commis l'erreur de prendre ses distances avec les Croix de Feu et le Front Paysan d'Oranie, économiquement très puissants.


Oran, le musée Demaëght
A l'entrée, deux statuts du sculpteur Paul Belmondo accueillant les visiteurs.


Le renouvellement des conseils municipaux était prévu pour le mois de mai 1935. Le premier, l'abbé Lambert engageait le combat et lançait un hebdomadaire Dimanche. L'opposition de droite ne désarmait pas et fondait un « comité de Salut Public ». Les propos échangés lors des débats contradictoires ou par communiqués de presse devenaient violents, grossiers, vulgaires (21).
Ils s'en prenaient à la vie privée des candidats, au budget municipal, à la gestion de l'eau. Le peuple d'Oran avait tranché. Au scrutin de ballottage du 12 mai, la

liste Lambert d'Action Démocratique et de Progrès Social l'avait largement emporté devant la liste socialiste de Marius Dubois (22). Les listes de Salut Public et communiste avaient été éliminées au premier tour.
L'abbé Lambert triomphait. Il devenait président de la Fédération des Maires d'Oranie, dont la majorité était de sensibilité de droite et appartenait au Front Républicain National. Les fêtes nationales du 14 juillet et du 11 novembre étaient célébrées avec faste. Les drapeaux et les militaires étaient plus nombreux et prenaient le pas sur les civils. Le général Giraud, commandant la place, passait les troupes en revue, au petit trot de son cheval. L'abbé Lambert continuait de se démarquer des forces de gauche. Il « ratissait» plus large et cherchait à s'ancrer à droite. Il avait interdit toutes les manifestations d'associations, de sociétés, de groupements quel qu'en soit l'idéal ou la raison sociale, mais avait laissé se faire le défilé des 4000 « Croix de Feu » du capitaine Richard. Il ne négligeait cependant pas les manifestations populaires et participait au cinquantenaire du lycée de garçons. II inaugurait le nouveau musée d'archéologie et lui donnait le nom de Demaëght(23). Il réaffectait au culte musulman la mosquée Sidi El Haouri autrefois occupée par l'Armée, et étendait le bénéfice des soupes populaires à tous les quartiers arabes. Il faisait rénover les cimetières des divers cultes et subventionnait les clubs de jeunesse.

Des élections législatives étaient prévues pour le printemps 1936. L'abbé Lambert décidait de se présenter et fondait le « Rassemblement Populaire et National ». Ses discours et ses écrits évoluaient. Aux Espagnols, aux ouvriers, les « néos » des années précédentes, il tenait des propos antisémites en appelant à la « mobilisation générale contre les juifs et le Front Populaire », « ces gens qui n'ont pas de terre de France à la semelle de leurs souliers » (24), Après trois ans de paix raciale, les vieux démons revenaient.

Au premier tour du 26 avril, les Juifs avaient sanctionné l'abbé Lambert. Il arrivait en seconde position derrière le Front Républicain National de M, Gatuing, et devant la liste socialiste de M. Dubois. Le Front Populaire n'avait pu se faire à Oran, où trois autres listes de gauche étaient en concurrence, radicale-socialiste, union socialiste et communiste. L'union se faisait en revanche au second tour, tandis qu'à droite l'abbé Lambert maintenait sa candidature. L'Écho d'Oran, qui lui était hostile, dans un ultime éditorial, appelait à faire barrage à la gauche, « Lénine, prophète de malheur a dit; Après la Russie, l'Espagne. » Il concluait: « et après ? ». Au second tour du 3 mai, le socialo-communiste Marius Dubois était élu député Front Populaire de la première circonscription d'Oran, devant Marcel Gatuing et Gabriel Lambert. L'abbé Lambert ne s'était imposé que dans quelques communes voisines: Arcole, Er Rahel, Lourmel, l'espagnole Mers el-Kébir, et surtout Saint-Denis-du-Sig. Partout ailleurs, et dans les bureaux de vote de la ville, il était en recul. Il demeurait cependant maire d'Oran, seconde ville d'Algérie, et ne se sentait nullement prêt à renoncer. Le 18 juin, le gouvernement Front Populaire prononçait la dissolution des mouvements nationaux de droite et d'extrême-droite.

L'abbé Lambert réagissait sans tarder, et partait ouvertement en guerre contre la coalition socialo-communiste. La mobilisation des forces de gauche n'avait rassemblé dans les vieux quartiers de la Marine que 12000 manifestants dont la moitié d'indigènes. Des incidents après la dislocation avaient éclaté un peu partout. On avait dénombré une quarantaine de blessés. Des gens avaient été molestés parce qu'ils portaient des cocardes tricolores ; des voitures   «   caillassées   »   boulevard Charlemagne et au faubourg Choupot; il y avait eu des échauffourées rue d'Arzew et au Coq Hardi rue El Moungar où un coup de feu avait été tiré.

Dans son éditorial du 16 mai, l'abbé Lambert avait écrit: « Quand nos amis crient la France aux Français, ils on! raison. La France doit être dirigée par ceux qui ont l'âme française. Que ces hommes soient d'origine métropolitaine ou espagnole, qu'ils soient catholiques ou musulmans, qu 'importe, pourvu que leur esprit soit à l'unisson de l'âme de la France chevaleresque, amie de l'ordre et de la clarté en même temps que du progrès ».

L'initiative de l'abbé Lambert avait été suivie dans les départements voisins. Alger et Constantine rassemblaient leurs hommes politiques dans une « Fédération des élus nationaux », que l'on appelait, par référence au « cartel des gauches » de 1924, le « cartel des droites ». Cette fédération décidait de présenter un front uni lors des prochaines échéances électorales, les cantonales de 1937, et les élections aux Délégations Financières en 1938. Elle avait un double objectif, faire échec au Front Populaire et à son idéologie marxiste, maintenir la présence de la France Française en Algérie.
C'est le moment que choisissait l'abbé Lambert pour voyager, parcourir l'Europe et s'informer. Il s'était déjà rendu en Russie en 1935. Il allait cette fois en Italie. Il observait, étudiait, comparait. Il réalisait « L'œuvre maléfique de la dictature communiste » (25), et prenait conscience des efforts consentis, avec succès, par l'Italie fasciste de Mussolini en faveur de la classe ouvrière.


En décembre 1936 paraissait le projet Blum-Violette. Le texte prévoyait l'accession à la citoyenneté française d'une élite musulmane, qui, sans renoncer à son statut coranique, exercerait par le vote dans un collège unique, un droit politique.
Sans tarder l'abbé Lambert, avec le député des Droites d'Oranie, Paul Saurin, élaborait un contre-projet pour défendre le point de vue des Français d'Algérie. Il le rendait public et dans les premiers mois de 1937, « montait » le présenter et le défendre à Paris. Il multipliait conférences, déclarations de presse et entretiens. Paris était aux prises avec les grèves répétées, les manifestations de rues, les échauffourées, l'anarchie qui s'installait et paralysait la vie publique. L'abbé Lambert n'était pas écouté. L'Algérie n'était pas la préoccupation essentielle du gouvernement français.

De retour à Oran, le maire devenait le chantre de l'ordre français. Il allait de village en village et s'en prenait au Front Populaire et au parti communiste. À Arcole le 11 avril, il invectivait « ceux qui promettent la paix alors que leurs actions préparent la guerre et l'asservissement, ceux qui prêchent la lutte des classes et la haine entre Français, ceux qui ont tout fait pour saper la souveraineté française en Afrique du Nord ». Sa popularité remontait; elle s'envolait vers des sommets au mois de juillet, après l'épisode d'un attentat tragi-comique. Menacé de licenciement, le conservateur de la section artistique du musée (26) avait, à deux reprises, fait feu sur le maire. Seule la première balle avait porté. Elle avait traversé la base du poumon droit, frôlé le cœur et les artères mammaires internes avant de ressortir sans atteindre les fonctions vitales. À la clinique Saugues où le veillait sa mère, l'abbé Lambert, jeune et solide, s'était rapidement rétabli.

Aux élections départementales du 17 octobre pour le renouvellement de la moitié des conseils généraux, l'abbé Lambert était élu au premier tour dans la circonscription d'Oran-Kargentah. Le Rassemblement Populaire National d'Action Sociale avait soutenu sa candidature, contre une gauche divisée. Dans toute l'Algérie, la Droite Nationale triomphait, emportant 39 des 51 sièges à pourvoir.

lambert6-carteLe mois suivant l'abbé Lambert transformait ses « Amitiés » en «  Amitiés Latines » qui reprenaient le programme des « Unions Latines » du docteur Molle. Désormais il s'en prenait ouvertement aux Juifs et au Front Populaire de Camille Chautemps et Léon Blum (27) qu'il qualifiait de « manifestation d'impérialisme juif » (28). Oran vivait la période agitée de l'affaire Aaron Zaoui qui dépassait le fait divers et prenait les proportions démesurées d'une confrontation politique haineuse et raciste (29). En décembre, poussé par l'opinion populaire il se rendait en Espagne et le général Franco le recevait à Burgos. Depuis le début de la guerre civile, la droite oranaise, partagée entre l'Allemagne et l'Italie, se retrouvait dans le franquisme. Elle prenait ouvertement parti pour l'Armée et la Phalange et soutenait par des aides directes les troupes nationalistes au travers des frontières perméables et complices de l'enclave de Melilla. L'opposition oranaise avait conclu hâtivement que l'abbé Lambert était fasciste. Le climat politique se dégradait rapidement et le maire, un brin provocateur, cherchait à l'exploiter. Il n'hésitait pas à faire le salut en tendant le bras. En 1938, alors que l'Allemagne songeait à élargir son « espace vital », il s'y rendait sans toutefois rencontrer de notabilités marquantes du régime nazi. Comme il l'avait fait en Italie, il observait et comparait. D'un côté l'ordre et le plein-emploi, en France les troubles sociaux et le chômage. L'abbé Lambert en tirait des arguments électoraux et des raisons d'espérer le changement. Les élections partielles d'octobre aux Délégations financières de l'Assemblée Algérienne étaient un succès incontestable pour le Rassemblement National: 15 élus sur 24 candidats.
Mais l'abbé Lambert savait aussi développer des sujets économiques. Il rapportait les observations faites au cours de ses périples européens, faisait des exposés clairs, précis, citait des chiffres. Il démontrait que les nations qualifiées de fascistes avaient fait beaucoup plus pour le bien être et le retour au travail des classes populaires que les régimes socialistes et surtout communistes.  Il n'en oubliait pas pour autant de parler de la ville d'Oran, de ce qui avait été fait depuis 1934, et de ce qui restait à faire. Il n'omettait pas de citer les réalisations du Conseil Général où il siégeait, et qui concernaient la proche banlieue et la Corniche; les chemins ruraux, la reforestation, les réseaux téléphoniques, la suppression de l'archaïque tramway d'Oran à El Ansor et son remplacement par une ligne de cars confortables, sûrs et rapides. Le bilan était flatteur, le maire le savait et n'esquivait jamais la question de l'eau douce. Il était venu pour cela. Il l'avait promise aux Oranais. Ils avaient Brédeah, Ils auraient Béni-Bahdel. Déjà le barrage avait été surélevé l'an dernier pour porter sa capacité à 63 millions de mètres cubes. En parallèle avec sa destination première d'irrigation de la plaine de Marnia, Béni-Bahdel pourrait alimenter Mers el-Kébir et Oran par une canalisation de 190 kilomètres. Les travaux venaient de commencer avec la construction de souterrains. Les adjudications pour la conduite principale, les ouvrages d'art, les brise-charges et les stations de filtration étaient sur le point d'être lancées. Un emprunt de 40 millions de francs venait d'être voté par la ville (30). A très court terme l'eau douce sans restriction, coulerai! par tous les robinets d'Oran (31). Pour l'heure, fin décembre 1939, l'abbé Lambert, maire d'Oran, avait troqué sa soutane et son casque colonial, contre un uniforme et un képi. Il était aux armées, non plus pour servir son ambition, mais pour l'honneur de la France.

Rendu à la vie civile après l'armistice de Rethondes le 22 juin 1940, Gabriel Lambert retrouvait son fauteuil de maire, pour un temps très court. L'amiral Abrial, nommé le 18 juillet gouverneur général par le maréchal Pétain, le destituait sans tarder. Ironie des noms et de l'histoire, il nommait par intérim un certain Levéque.
Gabriel Lambert se révoltait contre cet abus de pouvoir pris sous la pression des autorités religieuses. Il se rendait à Vichy pour plaider sa cause et était très mal accueilli. L'Eglise dans l'État français avait retrouvé sa place et son pouvoir. Une réputation sulfureuse accompagnait l'ancien maire d'Oran. Il était éconduit. De retour en Oranie, il s'installait à Clinchant où il avait acheté une petite propriété. Le 14 juin 1941 il renonçait définitivement à la soutane et épousait Jeanne, Emma, Bettous, de Relizane. Le mariage ne l'empêchait pas de poursuivre ses activités politiques. Il recevait des personnalités engagées auprès du régime de Vichy, entretenait une correspondance régulière avec des dignitaires du gouvernement, affichait ouvertement ses opinions.

Après le débarquement américain du 8 novembre 1942, le capitaine Lambert reprenait du service aux côtés des Alliés et participait à la campagne de Tunisie. En 1944, illambert7-portrait-chapeau était nommé au Conseil Supérieur du Gouvernement où il avait siégé lors d'un premier mandat en 1937 Ses amis politiques ne l'avaient pas oublié.

L'éviction de Giraud et la mainmise de l'appareil gaulliste sur l'ensemble de l'exécutif algérien, déclenchaient une vague de répression sans précédent contre tous ceux qui étaient soupçonnés de sympathies pétainistes.

Poursuivi pour activités subversives et antisémitisme par la Chambre Civique d'Oran, Gabriel Lambert était interné dans un camp de Méchéria et condamné en 1945 à l'indignité nationale, à la perte de ses droits politiques et a la confiscation d'une partie de ses biens.

La vie locale sera marquée par le retour de Gabriel Lambert, gracié par le président Auriol en 1949.

Son discours avait changé. Il reprenait les idées socialistes qu'il professait dans les années trente, et défendait ses amitiés nouées avant et après la guerre, auprès des anciens communistes comme des nouveaux détenus politiques. Au niveau des partis, il se situait au centre, se voulait un « rassembleur » et repoussait les extrêmes en cette période toujours troublée par les rancœurs et les vengeances. Le 11 février, il se présentait au premier renouvellement triennal de l'Assembles Algérienne sous l'étiquette « d'indépendant » dans la 5eme circonscription d'Oran-Gambetta. Il l'avait emporté sur le docteur Larribère, communiste, et l'avocat Pierre Giudicelli du M.R.P.(32). Les résultats du vote étaient contestés par les têtes de liste de l'opposition, mais validés par le Conseil d'Etat.

Le dimanche suivant, le 18 février, lors d'une élection partielle, Gabriel Lambert faisait sa rentrée au Conseil général où il avait siégé comme vice-président en 1937...

Au Palais Çarnot où siégeait l'Assemblée algérienne, Gabriel Lambert, délégué de la 5eme circonscription d'Oran-Gambetta depuis février 1951, développait ses nouvelles priorités. Elles concernaient toujours en 1952 et 1953 l'amélioration du sort des détenus, mais maintenant pour des affaires civiles. Il rejoignait, en l'étendant aux Européens, une motion du M.T.L.D. et de l'U.D.M.A. qui concernait les seuls internés musulmans, et rencontrait un écho favorable auprès du Gouvernement général.

Gabriel Lambert participait également à la commission de l'habitat. Il demandait la création de logements économiques à la portée de la masse des foyers modestes de toutes confessions.

Au sein d'autres commissions, il intervenait encore et toujours avec détermination, à propos et compétence: Intérieur et Législation, Travaux publics et Grands travaux.

Les événements du 1er novembre 1954 le ramenaient aux réalités politiques algériennes.
La déclaration hostile adressée par la Fédération des maires à l'initiative de celui d'Affrevillc au gouverneur Léonard et au président du Conseil Mendès-France, le faisait réagir en conciliateur.

Modéré et se faisant apaisant, il faisait voter le 25 novembre une motion de confiance aux autorités. Le lendemain, il approuvait une seconde motion « Berger-Vachon », qui demandait instamment que « sans hésitation, sans faiblesse, comme sans injustice, l'ordre soit rétabli et les criminels châtiés ».

À la fin de l'année 1955, il s'opposait à Jacques Soustelle et à son projet d'intégration complète et par étapes, de l'Algérie à la France.

Le 2 février 1956, sa pensée ayant évolué, il reprenait à son compte les thèses que Ferhat Abbas avait développées en 1945. Il préconisait la recherche d'une solution qui n'écarterait pas la France mais donnerait plus de droits politiques aux Algériens musulmans.
Pour développer et mettre en pratique cette idée, il fondait un nouveau mouvement : « Volontés Françaises ».

La dissolution de l'Assemblée algérienne le 12 avril 1956 mettait fin à la carrière politique de Gabriel Lambert.

Sa santé s'était altérée. En 1962, il regagnait la métropole et s'installait à Cagnes-sur-Mer, dans son département de naissance.

Il mourrait religieusement à Antibes le 30 mars 1979 à 79 ans.
   
Paul Birebent


1 - Un autre abbé Lambert, à ne pas confondre, de l’ordre des Jésuites  et réfugié en Hollande avait publié à Haarlem en 1740, un roman libertaire, Aventures de trois coquettes, ou les promenades des Thuileries. L'ouvrage avait réédité à Paris en 1779.                                                   
2 - Les mystères du sourcier, chez Gallimard, en collaboration avec J.Gaillard                                                                          
3 - L’apprenti sourcier, au studio des Champs-Élysées                                                        
4 - Environ 65000 F de l’an 2000-9900€                                          
5 - Marcillat(J) L’abbé Lambert et les Oranais                                          
6 - Terme employé devant le conseil municipal (Communication naturel entre deux nappes aquifères »                   
7 - Lofti (Kkalil) Parcours n° 4, 1985                                              
8 - Marcillat (J), l’Abbé Lambert et les Oranais                                          
9 - Dermendjian, Parcours n°4                                            
10 - MM.H. Gallet,A. Aguilera,F. Bayle, Ch. Desage,J. Mabillard, L. Sanchez, G. Soler, J.Sauvignac                   
11 - 9623 contre 5039 pour la S.F.I.O et 331 pour le parti communiste
12 - Loterie Nationale fondée en 1933                            
13 - « Autrefois les femmes savaient se soigner. Il leur suffit aujourd’hui de prendre l’inégalable Jouvence de l’abbé Soury. Depuis plus d’un siècle, elle rend la santé aux femmes et remet le sang dans le bon sens », publicité 1933 – anecdote rapportée par P. Hugounenq, pharmacien place Kléber
14 - Sur 15528 suffrages exprimés, 9800 en moyenne ont été en faveur de la liste Lambert démocratique et de progrès social 
15 - L’Echo d’Oran du 19 mai 1934.
16 - 19 mai 1934, discours du doyen d’âge                                
17 - Pour la plus part, projets du syndicat d’initiative présidé par Emile Cayla

18 -L’Echo d’Oran du 06 juillet 1934.
19- M. Caré, ancien élève du lycée d'Oran, mort d'hydrocution le lendemain sur la plage de Damesme
20- Dubois-: 965; Lambert: 790; Torrécillas (PCF): 78.
21- Cinq journaux paraissaient à Oran: Oran Matin, Le Petit Oranais, la Dépêche Oranaise, Oran Républicain et L’Echo d’Oran, le plus ancien et avec  le plus fort tirage d'AFN.
22- 12500 voix en moyenne pour 36 candidats contre 7400 pour la S.F.I.O.
23- Du nom de son premier directeur conservateur, le commandant Demaëght.
24– Histoire de l'Algérie contemporaine, Ch.R Agéron, 1979 p. 369 - propos contredits par d'autres témoignages :.Écho de l'Oranie. juillet-août 1991 et non retrouves par l'auteur Archives d'Outre-mer.                                     
25 - Lofti (Khalil), Parcours n° 4.1985.

26 - A. Fernando (1880-1957), peintre Il a fait ses études à l'École des Beaux-Arts d'Alger et a été, pendant quelques années, directeur de ceux d'Oran.
27- Léon Blum, président du Conseil de 6.36 à 6.37, puis vice-président de Camille Chautemps de 6.37 à 1.38.
28 - Agéron (Ch. R.|, L'Algérie contemporaine
29 - Crime crapuleux pour une dette d'argent. Dans une voiture, à Noisy-les-Bains, Zaoui assassinait, en 1935, Aubertin. Jugé et condamné à mort en 1938, il était exécuté à Oran le 28 décembre 1948 (pour la dernière fois. la guillotine était utilisée en Algérie publiquement).                                    
30 - 100 millions de l'an 2000.

31 - L'eau de Béni-Bahdel arrivera enfin à Oran, sous la municipalité de Fouques Duparc. I948-I962.
32 - Mouvement Républicain Populaire fondé en 1944 par des chrétiens résistants (premier parti démocrate chrétien).

In : « l’Algérianiste » n° 106 -2004

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